Je sais que cela va paraître un peu bizarre, mais j'ai choisi de m'auto-interviewer: les questions sont les mêmes que celles que j'ai proposé aux demoiselles qui ont accepté departiciper à l'expérience.

Je vous laisse donc lire mon expérience.

Si vous souhaitez participer à ce projet, voici le lien où vous trouverez les modalités pour me contacter.

XXX

Venus

Bonjour Venus, pourrais-tu te présenter ?

Je suis VenusXIII, parfois Venus Velvet, ou Venus. J'ai 28 ans, et j'ai un long passé de modèle.

Aujourd'hui, j'ai pris ma retraite et j'en suis très heureuse.

Je suis en couple depuis plus de 4 ans avec un ancien élève d'une école de photo avec qui j'ai travaillé à l'époque, et c'est sans doute la meilleure chose qui me soit restée de cette époque.

Pour le moment, je ne sais toujours pas ce que je ferais lorsque je serais grande (ou pas la peine de me rappeler le fait que je suis DEJA grande)...

Quel a été le cheminement qui t'a mené à devenir modèle et quel a été ton parcours dans ce domaine (freelance, agence, amateur, pro,...) ?

J'ai commencé il y à 28 ans, j'avais à l'époque 6 mois, je n'étais qu'un petit bébé, à qui personne n'avait rien demandé.

Ma mère et ma grand-mère se promenaient à Paris ce jour là et sont tombées sur la plaque de l'agence pour enfants Frimousse, pour s'amuser, elles m'ont inscrite.

Durant plusieurs années, j'ai travaillé pour eux, avec fiches de paye, cotisations, pour la retraite, etc...

Vers 4 ans, en plein hiver, je devais poser pour des photos de magazines, en tenues d'été, ce fût la goutte d'eau qui fit déborder le vase: j'étais frigorifiée, congelée sur ce maudit manège ouvert aux quatre vents, alors j'ai pleuré, on m'a offert un chouchou avec 3 petites boules que j'ai gardé durant des années, mais moi, à l'inverse, j'ai arrêté de travailler pour eux. Ils ont trouvé une petite fille dans la rue pour poursuivre la séance.

Durant ces quatre ans, j'avais fait des couvertures, des packagings, des pages mode, pour la France, l'Europe, les USA, le Japon et que sais-je encore. J'étais blonde, les yeux bleus, la gamine mignonne en gros.

Vers mes 15 ans, j'ai eu envie de reprendre, durant de longues années j'avais dû régler un problème de dents de travers (et pas qu'un peu), et je n'avais donc pas pu reprendre cette activité.

Je retournais à l'agence Frimousse, qui se fit un plaisir de me reprendre, j'étais encore et toujours blonde, avec des cheveux jusqu'aux fesses, c'était parfait...

Je travaillais deux fois pour eux, une série de photo de mode dans le magazine Loli, sur 5 ou 6 pages (peut être plus), dans le quartier de Montmartre, et une autre pour la RATP.

Je faisais quelques castings pour des vidéos, mais réellement, ça ne fut jamais mon truc.

Un an plus tard, les choses ne vont plus: je suis gothique, et les cheveux noirs et les piercings, ça ne passe plus pour une agence enfant, donc j'arrête à nouveau.

Je tente une autre agence, mais mon look est dans ce cas trop soft pour eux... Je laisse tomber.

Vers 2006, l'idée me reprend, je me dis, à près tout, pourquoi pas. Je commence à démarcher les photographes, n'ayant plus aucun book à jour... Les choses se font, je commence quelques séances, et je suis rapidement repérée par l'école Louis Lumière pour servir de modèle aux élèves.

Je travaillerais régulièrement pour eux.

Il en est de même pour d'autres écoles, avec qui je collaborerais...

Pour faciliter les choses, je décide de m'inscrire en agence, je suis prise dans deux: Céline et VIP Model, mais il faut être honnête, cela ne débouchera jamais sur rien: m'envoyer sur des castings pour les filles de 1m80 pour 30kg, évidemment cela ne fonctionne pas.

J'ai aussi travaillé pour Guitar Part dont je fis la couverture une année, ainsi que quelques apparition dans le magazine à différentes pages.

Pour le Queen, où j'apparu sur un flyer, et pour des créatrices de mode: entre autre la marque Voriagh, et un défilé lors de la Fashion Week pour Lollipops.

Entre 2007 et 2011, je pense avoir fait près d'une centaine de collaboration différentes, dont un grand nombre où je n'ai jamais eu les images...

Couverture Guitar Part

Couverture Guitar Part

Quelles étaient tes limites lorsque tu as débuté dans ce milieu (lingerie, topless, nu,...) et ont-elles changé au fil du temps ? Si oui, pourquoi ?

Lorsque j'ai débuté la photo j'avais fait un pacte avec moi même: je ne ferais aucune apparition sexualisée, pas de nu, pas de topless, pas de lingerie, pas de maillot de bain, ni rien de tout cela.

Lorsque j'étais encore bébé, j'avais fait une séance photo pour une marque où j'apparaissais complètement nue, la boîte où j'étais imprimée avait été distribué à travers toute la France (peut être plus, mais je n'en ai jamais eu connaissance). Certes, il est impossible de me reconnaître, mais je n'apprécie pas du tout cela, personne ne m'avait rien demandé ( de toutes manières qu'aurais-je pu dire à cet âge?), et j'en veux à ma mère d'avoir accepté cela. Les lois de l'époque étaient beaucoup moins strictes que celle d'aujourd'hui.

Bref, quoi qu'il en soit, j'avais en tête de faire du portrait et de la mode, rien qui puisse atteindre ma pudeur.

Puis, un jour, je vais sur une séance prévue avec une photographe avec qui j'avais déjà travaillé, et là, à l'autre bout de l'île de France, après le maquillage et la préparation, elle me dit que c'est du maillot de bain... Certes, du une pièce, mais tout de même.

Je ne suis pas contente, mais je finis par accepter...

Au fil du temps, il s'est avéré que je brisais de plus en plus mes limites, et cela ne m'a pas plu: après le maillot de bain la lingerie, puis le topless (avec nipples)...

Cela suffisait, je ne voulais pas être vu comme un corps, mais comme une âme et un visage.

Auto-interview VenusXIII: " J'ai été profondément humilié (...), je me suis sentie salie, presque violée"
Auto-interview VenusXIII: " J'ai été profondément humilié (...), je me suis sentie salie, presque violée"

J'imagine à la vue de ma propre expérience, et de l'époque dans laquelle nous vivons que tu devais avoir des books onlines. Par quel média te contactait-on le plus souvent ?

Comme beaucoup de demoiselles, j'avais book.fr, modelmayhem, Facebook, Myspace, etc...

Travaillais-tu de manière rémunérée ou en « Poses contre photo ? »

J'ai très peu travaillé en "pose contre photo", la photo n'a pas été pour moi une passion, c'était un travail et ce, depuis toujours.

J'ai collaboré gratuitement à quelques reprises pour gonfler mon book, ou lorsque j'appréciais les personnes, à mes débuts, lors de ma reprise.

Par la suite, il n'en était même pas question.

En ce qui concerne tes shootings, te présentais-tu seule, accompagnée, etc ?

Je suis toujours allée seule sur les séances, je n'avais pas envie d'imposer cela à mes ami(e)s, et je trouvais normal que pour un travail, je ne vienne pas accompagnée d'un chaperon.

As-tu déjà reçu des propositions dérangeantes, dégradantes ou avilissantes lors de ces premiers échanges avec les photographes ?

J'ai eu tant de propositions répugnantes, dégueulasses, avilissantes que je ne pourrais même pas les énumérer, faire une liste exhaustive.

Combien de fois a t on voulu me prendre pour une prostituée, une escort, une actrice porno, une domina, et que sais-je encore.

Pourtant, j'avais réussi à toujours conserver cette image non vulgaire, non provocatrice, non sexuelle telle, du moins c'est ce que nombre de personnes m'ont assuré et je pense que c'est la réalité.

Vous pouvez en trouver quelques exemples dans ces pages:

J'ai été profondément humilié que l'on puisse m'associer à cela, je me suis sentie salie, presque violée, dans mon amour-propre, dans ma façon de concevoir les choses.

Certes, les exemples ici, ne sont pas forcément très parlant, il y en a qui l'étaient bien plus, mais parfois, dans ces cas là, on a qu'une seule et unique envie, effacer au plus vite les traces, ces vomissures qui viennent vous souiller, ces messages où l'on vous compare à une chatte dans laquelle on rentrerait bien, dans des situations qui vous répugnent.

Voici le dessin qu'une de mes amies avait fait à cette époque, toutes les petites phrases viennent des mails que je recevais quotidiennement.

Quelques uns de mes pétages de plombs :

6 avril 2011:

"Apres actrice porno, animatrice webcam X, on me propose d être escort girl!!!! Génial, j ai juste des envies de castrations pour ceux qui me propose ce genre de choses!!!"

Auto-interview VenusXIII: " J'ai été profondément humilié (...), je me suis sentie salie, presque violée"

Pourrais-tu me décrire un « shooting-type » pour avoir une idée un peu plus précise de ton activité ?

Je ne pourrais pas donner de "shooting-type", j'ai eu trop de situations différentes: avec les pro, avec les élèves, avec les amateurs pour pouvoir faire un exemple qui parlerait.

T'es-tu déjà retrouvée dans une situation qui t'a mise mal à l'aise, où tu t'es sentie en danger ou bien as-tu réellement vécue une expérience traumatisante lors de ton parcours ?

Oui, à plusieurs reprises, plusieurs fois à Louis Lumière, cette fois-ci était lors d'un stage de professionnels, qui venaient se spécialiser:

Je travaillais tranquillement, et à plusieurs reprises, j'entendis et l'on me rapporta des propos salaces que l'un des stagiaires faisaient sur ma personne, du genre qu'il me ferait bien m'asseoir sur ses genoux (avec le sous-entendu graveleux bien entendu), ou alors que j'étais assise par terre, en jupe, et que l'enseignant donnait son cours sur la méthode d'éclairage, ce type (répugnant, tout autant physiquement que mentalement), se glisse un peu sur le côté, et avec son téléphone portable, essaye de prendre des photos de sous ma jupe. C'est l'une des élèves présente ce jour là, qui est venue me mettre en garde.

J'ai été profondément blessé au fil du temps du mépris de certains: de certains élèves en photo qui m'estimaient trop bête pour ne serait-ce que m'adresser la parole. Je peux vous donner un exemple, qui au final me fait bien rire: l'un des élèves de Louis Lumière était dans cette optique, modèle = idiote donc pas de contact, pas de paroles, imaginons qu'elle est bête à bouffer du foin. Lors d'un cours, le prof que je connaissais bien, demande aux élèves de faire du high-key, je vois mon élève perdu, qui ne semble pas réellement savoir à quoi cela correspond. Je finis pas lui expliquer. Son regard change, pas juste un peu, non, je vois les étincelles dans ses yeux: "elle sait! Mon dieu, elle a un cerveau!", au final, celui-ci m'a carrément demandé si je pouvais lui montrer comment on faisait les réglages. Hum, j'ai donc dû lui expliquer que la théorie, certes, je la connais, mais la pratique c'est son domaine, chacun son boulot. Quoi qu'il en soit, il a finit par être aimable avec moi jusqu'à la fin de la session.

J'ai eu celle qui ne m'a jamais adressé la parole, qui a préféré prendre un de ces amis comme modèle plutôt que moi qui était payée par l'école pour ça. Pas une seule fois durant le stage elle ne m'a regardé ni même dit bonjour. J'étais semble-t'il répugnante à ses yeux.

Je ne compte plus le nombre de photographes qui ne m'ont jamais ne serait-ce que montré les photos, un travail que nous avons fait en commun, je ne parle pas de me les donner, juste de me les montrer, non, je n'étais rien, qu'un vase dont on tire une image, et ce vase n'a bien sur pas besoin de voir le résultat de son travail, car celui-ci n'a pas d'âme, rien, il est vide de tout.

Et surtout, l'une de mes dernières expériences, celle qui me donne la nausée rien que d'y penser, et c'est de ma faute, ayant trop de demandes je prenais moins de temps à réfléchir, à analyser les gens, voir et comprendre leurs motivations et leur honnêteté.

J'avais reçu un coup de téléphone d'un homme, la voix plutôt chevrotante, donc plutôt âgé. J'avais dit oui à une séance sans même me pencher sur la question, sans regarder son book ou quoi que ça soit.

Le rendez-vous était convenu, en banlieue chez lui, j'ai confiance dans les personnes âgées, sans doute est-ce lié à mon éducation par mes grands-parents, même si certaines expériences auraient dû me mettre en garde sur le fait que l'âge n'est pas signe de perfection, mais je ne m'étendrais pas sur le sujet.

J'y allais avec mon sac, mes tenues, de la lingerie, comme d'habitude rien de sexy: pas de dentelle transparente, pas de string ou que sais-je encore.

Je tombe sur un viel homme sans doute dans les 80 ans ou 85 ans, ancien médecin, veuf, le bras dans le plâtre.

Je vais me changer dans la salle de bain et reviens, les photo auront lieu dans son salon, je me dis que l'âge n'est pas significatif quant à ses talents ou non talents en photographie, jusqu'à ce que je vois son appareil photo, un numérique, de poche, du bas de gamme, très peu de pixels, bref, un appareil qui devait être en entrée de gamme il y a une dizaine d'années.

Je commence à me sentir un peu mal à l'aise, mais je suis professionnelle et je garde confiance.

Au fur et à mesure de la séance, je me sentirais vraiment très mal à l'aise.

Il commencera à me vouloir de manière très obsesionnelle à ce que je fasse du topless, puis du nu, critiquant ma pudeur, me disant que ça n'est pas normal à notre époque de ne pas accepter la nudité, il critiquera mon choix de pseudonyme, insistant sur le fait que la déesse du même nom est la déesse de l'amour charnelle, incluant donc la nudité, le sexe.

Qu'importe mes réponses, que cela soit sur le statut de femme qu'elle honore et non celui de mère nourricière, que cela est aussi en lien avec la planète, etc...

Chacune de mes réponses sont moquées, retournées et manipulées pour tenter de me faire culpabiliser et me soumettre à ses choix.

Je tiens tête, une gamine débutante ne l'aurait pas fait, il a trop de confiance en lui.

Alors que je pose, il vient et tente de me toucher pour remettre le rideau, la bretelle du soutiens gorge, je suis vraiment, vraiment mal...

Il s'entête, insiste, et moi aussi de mon côté, je ne cède pas.

La séance se termine, je vais me changer.

Je sais que je suis face à un pervers manipulateur, ça n'est pas la première fois, je sais comment ne pas céder, je sais qu'il n'arrivera pas à ses fins. Je suis maîtresse de moi, je suis polie mais sûre de moi.

Nous avons terminé, nous allons dans son bureau, sans doute son ancien cabinet, avec des livres d'anatomie, de médecine, un pied et un morceau de bassin (des vrais ossements, je prend le morceau de bassin dans ma main et suis étonnée de sa légèreté, c'est le seul souvenir correct de cette après-midi, car j'ai appris une chose, même si j'aurais préféré que ça soit dans une autre situation).

Il me parle, je suis sur la défensive, il me parle de ses autres modèles, d'une de 18 ans, qui ne voulait pas poser nue, et qui au final à fini par accepter suite à ses demandes répétées, il n'a pas honte, ne voit pas le mal. Je connais son passé de médecin, mais ça n'est pas une pudeur effacée par trop de corps vus et étudiés, c'est un fantasme qui l'habite, il cherche des modèles pour satisfaire ses envies, même si ces dernières ne sont que visuelles, et d'apparence pas sexuelles.

Il me parle donc de cette gamine qu'il a fini par convaincre de poser nue alors qu'elle ne voulait pas, il s'étonne qu'elle n'ait jamais redonné de nouvelles, qu'elle ait refusé tous ses appels.

Moi, je ne m'étonne pas, je comprend la demoiselle, la situation, la sensation de s'être vendue, prostituée en quelques sortes pour de l'argent, d'avoir été manipulé par un homme, pour ses désirs, d'avoir dû consentir à une nudité qui n'était pas voulu.

Il est difficile d'expliquer cette sensation, difficile de comprendre et d'être compris pour ce genre de choses, les gens qui n'ont pas été dans cette situation ne peuvent sans doute pas le concevoir, d'être forcée à faire certaines choses contre son gré sans pour autant qu'il y ait violence, menace, mais c'est tout là le "talent" de ce type de personnalité: arriver à ses fins sans physiquement blesser, sans violence, mais finir par dominer l'être en face de soit pour en faire ce que l'on veut.

Je suis ressortie de là, le plus vite possible, je me sentais sale, humiliée, souillée... Je m'en voulais de m'être mise dans ce guêpier de moi même, de n'avoir pas su ou pu hausser le ton, de prendre mes clics et mes claques et de foutre le camps en claquant la porte.

J'ai honte de cela, honte de m'être fait avoir, de ne pas avoir su réagir correctement à cette situation.

Je sais pertinemment qu'il n'aurait rien pu m'arriver, son bras dans le plâtre l'aurait empêcher de faire quoi que ça soit, de même que son âge et son état général. Tout le monde n'est pas Ted Bundy, portant un faux plâtre et appitoyant sur son état physique pour arriver à ses fins.

Quoi qu'il en soit, ce fût réellement ce jour, que je me suis dit que la photo était terminée, que j'avais PEUR, oui, réellement peur de ce qui pouvait m'arriver, que le fait de faire ce métier pouvait me mettre dans des positions de fragilité et que cela n'était tout simplement pas concevable à partir du moment où notre instinct de survie fonctionne un minimum.

En lisant cela, je suis sûre que certains vont tenter de minimiser, de penser que je divague, que je suis trop émotive, ou que sais-je encore.

Non, c'est le genre de situation dans laquelle une femme se sent vulnérable, agressée, le fait de se sentir sale n'est pas un mythe, on veut retirer cette humiliation par toutes les manières, et l'eau est celle qui semble la plus simple, car il est impossible de nettoyer de cette manière son âme.

Bien évidemment il en est de même pour les hommes, et nous avons malheureusement tendance à l'oublier.

Pourquoi as-tu décidé de poursuivre/ d'arrêter la photographie ?

Je ne supportais plus le fait d'être prise pour quelque chose (oui, le terme "chose" est choisi volontairement) que je n'étais pas, je me sentais souillée régulièrement, par les propos que je lisais régulièrement, par les propositions dégradantes que je recevais.

Je ne suis pas un sac à foutre comme certains l'ont cru, je ne suis pas une poupée gonflable qui dira amen à chaque proposition, même les plus dégradantes juste pour un peu de fric.

Bref, en gros, je ne me prostitue pas, et je plains de tout mon coeur, ces filles, qui par choix ou non (je parle des prostituées), qui sont chaque jour souillées par les actes, et les propos de ce genre de bête, qui n'ont aucun respect pour la femme et ne pense qu'à leur petite queue.

Je plains de tout mon coeur, ces filles qui doivent pour des raisons qui leur sont propres subir les assauts et les fantasmes de ce genre de pervers, pourrissant leurs âmes et leurs corps, et les traumatismes qui seront liés, l'amour-propre et leur honneur qui sera mis à rude épreuve.

Pourquoi je parle des prostituées? C'est simple, beaucoup nous voient ainsi...

J'ai eu peur, j'ai pleuré, j'ai douté de moi, de ma valeur réelle, de l'image que je renvoyais, des hommes, de l'humain... J'ai crains pour celles dont l'instinct n'est pas développé, et c'est le but de ce projet: partager les expériences et appeler à la méfiance.

Lio

Lio

Ta vision du monde de la photographie de modèle a t'elle évolué depuis que tu le fréquentes de l'intérieur ?

 

Ma vision a changé entre le moment où j'ai été modèle junior et le moment où je suis devenue adulte, non pas l'âge aidant, mais juste par rapport aux réactions que j'ai du essuyer, et qui étaient très différentes.

Je n'ai vraiment pas supporté cette volonté de sexualiser toutes les femmes, d'en faire des objets de chair.

J'ai perdu foi en beaucoup de choses, et en moi-même. Je me suis renfermée, je n'arrivais plus à accepter la manière dont on me percevait, j'avais des difficultés à savoir où était la réalité et le fantasme extérieur.

Il est difficile, même, lorsque les commentaires sont flatteurs et positifs de savoir le vrai du faux, on se perd alors dans des réflexions sur soi, sur l'humain, sur la sexualité, sur l'époque dans laquelle on vit.

On se perd au final de n'être qu'une image, qu'un reflet qui est si loin de notre réalité profonde. On devient en quelques sortes schyzophrène, avec notre vraie personnalité et celle qui apparaît aux yeux de tous. 

 

 

 

Autoportrait

Autoportrait

Cette expérience comme modèle a t'elle eu une incidence sur ta vie quotidienne ?

Comme le "traumatisme" était profond, que je me pose des questions en permanence sur tout et tout le temps, cela a en effet eu une incidence.

En réaction, je me suis mise à ne plus être féminine, ne plus faire attention à moi, à fuir tous les appareil photos, car je voulais fuir au maximum tout ce qui pouvait me rattacher à cette image que je ne voulais plus avoir.

Je me sentais humiliée, stupide, j'avais des doutes sur moi même, sur mes choix de vie, sur mes capacités intellectuelles, etc...

J'avais perdu foi en moi même, et dans le regard des hommes.

J'avais la sensation de m'être perdue en cours de route, d'avoir pris le mauvais chemin.

Aujourd'hui encore, je suis tiraillée avec ce passé, avec l'idée que c'était une erreur, et que je ne dois donc plus retomber dans ces travers, que je ne suis pas une jolie poupée idiote, et celle où je dois me réapproprier mon propre corps, ma propre image, pour qu'elle m'appartienne à nouveau.

Sans doute pour cette raison que depuis quelques temps je m'amuse avec Instagram à faire mes auto-portrait, non maquillés, plus en phase avec mes émotions et mes manières de penser.

Je me sens aussi obligée de prouver que je ne suis pas un cerveau vide, et d'utiliser les mots, et les maux pour cela.

Bref, me découvrir plus, pour dissimuler, quelqu'un que l'on a cru que j'étais faussement.

Autoportrait

Autoportrait

Selon toi, comment sont perçues les modèles photo que cela soit par le public en général, par les photographes et même par les proches et la famille ?

Cela est variable, à mes yeux, il y a une partie de la population qui aime suivre les modèles, le plus souvent ces derniers voient une image idéalisée, peut être quelqu'un qu'ils aimeraient connaître plus en profondeur, ou peut être qu'ils aimeraient être.

Quelques uns vont parfois au delà des apparences et cherchent à comprendre qui se trouve derrière le masque.

De la part des photographes, les cas sont nombreux, certains vont vous voir comme un égal, dans le sens collègue, car une image sans modèle n'a pas d'intérêt (lorsque l'on fait de la photo avec des humains, bien sûr!), elle n'est rien qu'un fond vide, ces derniers, seront respectueux, et se sont les meilleurs.

D'autres, ne vous voient que comme un moyen d'accéder à une popularité, ils vous prendront si vous êtes "in", et ne daigneront pas un regard si vous êtes débutante ou en "fin de carrière", généralement, vous pouvez vous comparer à un mouchoir jetable. Parfois, ceux-ci en recherche de notoriété, ou encore déjà "célèbres" (oui, je suis désolée, mais la célébrité facebookienne, à mes yeux ne vaut pas un clou... mais c'est un autre débat), chercheront parfois à vous foutre dans leur pieu (cela ne m'est jamais arrivé personnellement, mais j'ai souvent eu vent de...)

Il y a aussi les "faux-tographes" comme beaucoup aiment les appeler sur la toile: pas de connaissances dans le domaine, des photo de très mauvaises qualités, et ne tentant rien pour s'améliorer, ceux-ci sont généralement, ceux qui vous proposeront les plans les plus grind et les plus tordus... Je ne sais pas s'ils s'imaginent maîtriser un appareil, mais quoi qu'il en soit, c'est un désastre sur tous les plans.

Pour les autres: la famille, je pense que tout dépend de celle que vous avez, du milieu culturel et social, pour moi, que pouvaient elles dire, c'est elles qui m'avaient mis le pied à l'étrier, elles ne pouvaient qu'être heureuse que je poursuive dans la voie qu'elles m'avaient tracé.

Les amis ou conjoint, certains n'acceptent pas, mais vraiment pas du tout, imaginant qu'en raison de votre activité vous n'êtes plus la même, que vous êtes hautaine, que vous avez pris la grosse tête, bref, ils vous tourneront le dos. Moi, même je suis incapable de dire si ma manière de penser lorsque j'étais modèle à l'époque, je suis incapable de dire si j'ai eu une phase de ce genre, donc je ne suis pas à même de répondre à cela.

Enfin, quels sont les conseils que tu aimerais donner aux demoiselles qui décident de se lancer dans cette activité ?

Il y a trop de conseils à donner, mais je pense qu'il faut en priorité se protéger des quelconques écueils que vous pourriez subir.

Faite confiance à votre instinct, si vous ne sentez pas quelqu'un: n'y allez pas, ne vous forcez pas, comme je l'ai fait.

Si vous en avez assez d'être déconsidérée, ne poursuivez pas dans cette voie, le temps n'arrangera rien et fera encore plus accroître votre malaise jusqu'à saturation définitive.

Hina

Hina

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